paysage domestique

déambulation - 2006

Juste ça — Contempler.
Je ne fais que ça… Regarder, observer et attendre pour voir s’il se passera quelque chose. J’essaye de dessiner des objets — Oui, j’essaye, mais la plupart du temps,
je ne les manipule que du bout des doigts en espérant ne pas trop les abîmer. Car ces objets ne sont encore que des constellations d’idées qui supportent
très mal la violence d’une interrogation… Je reste là, et je me demande ce qu’elles pourraient devenir face au quotidien. Et ensuite, finalement je les assemble
à d’autres constellations d’idées que je sais plus résistantes et que je sais plus vieilles, pour qu’un peu, elles vivent. La réalité, c’est que je ne crée pas,

j’assemble.

Alors voilà, juste ça — Assembler et contempler.
Et construire un paysage de références, avec lesquelles j’ai l’impression que je pourrai y arriver. Regarder un paysage.
C’est ça mon métier — une tentative de montrer le paysage qui m’aide à devenir designer et que moi seul arrive à lire.

Donc — Le paysage.
Alors j’essaye de décrire ce monde… mais je n’y arrive pas. Ce n’est pas vraiment l’intimité que je dévoile qui me pose problème, c’est plutôt l’impossible justesse des mots,
je n’arrive à énoncer aucune vérité, aucune certitude. Et je sais pourquoi. Parce que ce paysage-là, n’est pas fini, parce qu’il se contredit, parce que je ne peux pas être juge et partie.
En tout cas, j’aimerais pouvoir me contredire et dire que c’est évidemment normal. En fait, l’évidence, La force de mon travail, c’est de provoquer de l’interprétation.
Encore une fois, je ne fais qu’assembler des éléments de ce paysage et c’est le contemplateur qui construira, puis interprétera le paysage. — Merci.

Alors voilà, mon travail est comme un roman.
Il n’y aura pas de héros, il n’y aura pas de destin, juste des faiblesses. Presque la vie.
Il y aura des personnes qui se contrediront et ils seront tous un peu moi.
Il y aura David Wingate, pas encore adulte, pas même brillant, qui se raccroche à l’heure qui passe et à une mère que l’on espère imaginaire.
Il y aura Jean Cuvier, trop vieux pour vivre, assez vieux pour aimer, mais qui voudrait encore y croire et qui s’oublie.
Il y aura deux sœurs jumelles.
Il y aura des enfants… j’imagine.
Il y aura…

Il y aura le paysage.
Évidemment. C’est lui le personnage le plus important.

Voilà… ça catalyse, et tout devient simple.
Mon travail ne sera pas un roman, mais un western.
— Un western ?
— Oui, un western.

Et évidemment que je n’ai rien créé, je n’ai fait qu’assembler.

Aller… Musique.

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